Entre caresse et regard

Je photographie depuis les années 80. Aujourd'hui, je dégage différentes constantes dans mon travail. Quelques mots-clés permettent d'en rendre compte. 
D'abord, l'acte photographique est la caresse d'une surface, celle de la peau du monde. Je photographie en pensant que le résultat est constitué de gouttes d'encre sur la surface du papier. La peau du monde doit se retrouver sur la surface sensible de l'image car la photo est un transfert de surfaces : du réel du monde au réel du papier. 


Extrait de la série : "Les Lucioles en hiver" (2012)

La peau du monde peut être minérale, dans le cas des paysages géologiques, mais également végétale, et bien sûr humaine. Le choix du papier participe à l'expression finale de ce qui se révèle être un portrait plutôt qu'un récit. Dans la série des arbres ou des pierres, par exemple, le motif est traité comme un portrait, un visage, une figure. L'image a une dimension animiste. Cette dimension, je l'ai retrouvée dans les portraits des miroirs du Népal. La capture de l'image dans le miroir participe à cette fascination de la surface qui révèle sa profondeur. La surface transparente de la serre est aussi la profondeur d'une nature domestiquée.


Extrait de la série : "Miroirs du Népal" (2010)
Cliquez ici pour accéder à quelques images de cette série:
Miroirs du Népal

Parfois j'utilise des filtres colorés. Je les positionne manuellement devant l'objectif. Je cherche l'inclinaison qui me permet un traitement de la lumière et une capture des images qui se reflètent sur le filtre. Je joue ainsi avec la surface du filtre pour créer une superposition d'images à la prise de vue. Deux mirages dialoguent dans l'image.


Eglise de Banon (2013)

Je traque la magie des images pour produire des apparitions, épiphanie de mirages déroutants. Je casse la convention de la représentation par manipulation des codes plastiques. Je regarde le paysage avec les yeux du géologue, je cherche à affirmer les plis des roches pour montrer les dessous du paysages. L'image est choisie non pas pour représenter mais pour exprimer la mémoire géologique, les forces qui modèlent la surface visible du paysage.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire